Quels qu’eussent été les motifs initiaux de trouble dans le cœur de Lucifer et de Satan, la révolte se concrétisa sous forme de la Déclaration Luciférienne de Liberté. La cause des rebelles fut exposée sous trois rubriques :
1. La réalité du Père Universel. Lucifer prétendit que le Père Universel n’existait pas réellement, que la gravité physique et l’énergie d’espace étaient inhérentes à l’univers, et que le Père était un mythe inventé par les Fils du Paradis pour leur permettre de conserver le pouvoir sur les univers au nom du Père. Il nia que la personnalité fût un don du Père Universel. Il insinua même que les finalitaires étaient de connivence avec les Fils du Paradis pour introduire la fraude dans toute la création, car ils ne rapportaient jamais une idée bien nette de la personnalité actuelle du Père telle qu’on peut la discerner au Paradis. Il traita le respect d’ignorance. L’accusation était catégorique, terrible et blasphématoire. C’est sans aucun doute cette attaque voilée contre les finalitaires qui incita les citoyens ascendants alors présents sur Jérusem à rester fermes et à résister résolument à toutes les propositions des rebelles.
2. Le gouvernement universel de Micaël, le Fils Créateur. Lucifer soutint que les systèmes locaux devaient être autonomes. Il protesta contre le droit de Micaël, le Fils Créateur, d’assumer la souveraineté de Nébadon au nom d’un Père Paradisiaque hypothétique et de demander à toutes les personnalités de reconnaitre leur allégeance à ce Père invisible. Il affirma que tout le plan d’adoration était un stratagème pour servir l’ambition des Fils du Paradis. Il accepta de reconnaitre Micaël comme son père-Créateur, mais non comme son Dieu et son chef légitime.
Il attaqua très violemment le droit des Anciens des Jours – « potentats étrangers » – de se mêler des affaires des systèmes locaux et des univers. Il stigmatisa ces dirigeants comme tyrans et usurpateurs. Il exhorta ses partisans à croire qu’aucun de ces dirigeants ne pouvait rien faire pour interférer avec le jeu de l’autonomie complète, pourvu que les hommes et les anges aient seulement le courage de s’affirmer et de réclamer audacieusement leurs droits.
Il prétendit que l’on pouvait empêcher les agents exécutifs des Anciens des Jours d’agir dans les systèmes locaux, pourvu seulement que les indigènes veuillent affirmer leur indépendance. Il soutint que l’immortalité était inhérente aux personnalités du système, que la résurrection était naturelle et automatique, et que tous les êtres n’étaient empêchés de vivre éternellement que par les actes arbitraires et injustes des agents exécutifs des Anciens des Jours.
3. L’attaque contre le plan universel d’éducation des mortels ascendants. Lucifer soutint que l’on dépensait beaucoup trop de temps et d’énergie à instruire si complètement les mortels ascendants dans les principes d’administration de l’univers, principes qu’il qualifiait de peu éthiques et de malsains. Il protesta contre le programme obligeant à préparer, pendant des âges, les mortels de l’espace en vue de quelque destinée inconnue et signala la présence, sur Jérusem, du corps des finalitaires comme une preuve que ces mortels avaient passé des millénaires de préparation pour une destinée de pure fiction. Il fit remarquer avec dérision que les finalitaires n’avaient pas rencontré de destinée plus glorieuse que d’être renvoyés sur d’humbles sphères semblables à celles de leur origine. Il suggéra qu’ils avaient été corrompus par un excès de discipline et un entrainement trop prolongé, et qu’en réalité ils trahissaient leurs compagnons mortels, puisqu’ils coopéraient maintenant au plan cherchant à asservir toute la création en faisant croire au mythe d’une destinée éternelle pour les mortels ascendants. Il soutint que les ascendeurs devaient jouir de la liberté de déterminer leur sort eux-mêmes. Il défia et condamna tout le plan d’ascension des mortels parrainé par les Fils Paradisiaques de Dieu et approuvé par l’Esprit Infini.
Et ce fut avec cette Déclaration de Liberté que Lucifer déclencha son orgie de ténèbres et de mort.