En déchiffrant les phénomènes spectraux, il faut se rappeler que l’espace n’est pas vide et qu’en le traversant, la lumière est parfois légèrement modifiée par les diverses formes d’énergie et de matière qui circulent dans tout l’espace organisé. Certaines raies indiquant des matières inconnues qui apparaissent dans le spectre de votre soleil sont dues à des modifications d’éléments bien connus flottant dans l’espace sous forme d’éclats, victimes atomiques de violentes rencontres lors de la bataille des éléments solaires. L’espace fourmille de ces épaves errantes, et spécialement de sodium et de calcium.
Le calcium est en fait le principal élément de l’imprégnation par la matière de tout l’espace d’Orvonton. Notre superunivers tout entier est parsemé de pierre finement pulvérisée. La pierre est littéralement le matériau de construction fondamental pour les planètes et les sphères de l’espace. Le nuage cosmique, le grand manteau de l’espace, est composé en majeure partie d’atomes de calcium modifiés. L’atome de pierre est l’un des éléments les plus répandus et les plus tenaces. Non seulement il supporte l’ionisation solaire – la scission – mais il persiste comme identité associable même après avoir été bombardé par les rayons X destructeurs et fracassé par les hautes températures solaires. Le calcium possède une individualité et une longévité supérieures à celles de toutes les formes les plus ordinaires de la matière.
Ainsi que l’ont soupçonné vos physiciens, ces résidus mutilés de calcium solaire chevauchent littéralement les rayons de lumière sur des distances variées, ce qui facilite prodigieusement leur dissémination étendue dans l’espace. Avec certaines modifications, l’atome de sodium est également capable de locomotion par la lumière et par l’énergie. L’exploit du calcium est d’autant plus remarquable que la masse de cet élément est presque double de celle du sodium. L’imprégnation de l’espace local par le calcium est due au fait qu’il s’échappe sous forme modifiée de la photosphère solaire en chevauchant littéralement sur les rayons de soleil émis. Malgré son encombrement relatif, puisqu’il contient vingt électrons en rotation, c’est le calcium qui, parmi tous les éléments solaires, réussit le mieux à s’échapper de l’intérieur du soleil vers les royaumes de l’espace. Cela explique pourquoi il y a sur le soleil une couche de calcium, une croute de pierre gazeuse épaisse de dix-mille kilomètres, bien que dix-neuf éléments plus légers et de nombreux éléments plus lourds se trouvent au-dessous.
Le calcium aux températures solaires est un élément actif et doué de propriétés variées. Cet atome de pierre a deux électrons agiles flottant sur ses deux circuits électroniques extérieurs, qui sont très proches l’un de l’autre. Dans la lutte atomique, il perd de bonne heure son électron extérieur, sur quoi il se met à jongler magistralement avec le dix-neuvième électron entre le dix-neuvième et le vingtième circuit de révolution électronique. Plus de vingt-cinq-mille fois par seconde, il projette ce dix-neuvième électron dans un mouvement de va-et-vient entre sa propre orbite et celle de son compagnon perdu. C’est ainsi qu’un atome de pierre mutilé peut défier partiellement la gravité et réussir à chevaucher les courants émergents de lumière et d’énergie, les rayons de soleil, vers la liberté et l’aventure. Cet atome de calcium se déplace vers l’extérieur par saccades alternées de propulsion en avant, saisissant et lâchant le rayon de soleil environ vingt-cinq-mille fois par seconde. Et c’est pourquoi la pierre est le principal composant des mondes de l’espace. Le calcium est le fugitif le plus expert de la prison solaire.
L’agilité de cet électron acrobatique du calcium est indiquée par le fait qu’une fois projeté sur le cercle de l’orbite supérieure par les forces solaires de température et de rayons X, il n’y reste qu’un millionième de seconde, mais, avant que le pouvoir électrogravitationnel du noyau atomique l’ait ramené sur son ancienne orbite, il a fait un million de tours autour du centre atomique.
Votre soleil s’est dessaisi d’une énorme quantité de son calcium. Il en a perdu des masses colossales à l’époque de ses éruptions convulsives liées à la formation du système solaire. Une grande partie du calcium restant se trouve maintenant dans la croute extérieure du soleil.
Il ne faut pas oublier que l’analyse spectrale ne décèle que les composés de la surface du soleil. Par exemple, les spectres solaires contiennent beaucoup de raies du fer sans que le fer soit l’élément principal du soleil. Ce phénomène est presque entièrement dû à la présente température de la surface du soleil ; cette température, un peu inférieure à 3 300 degrés, est très favorable à l’enregistrement du spectre du fer.