Antioche était la capitale de la province romaine de Syrie, et le gouverneur impérial y avait sa résidence. Antioche avait un demi-million d’habitants ; c’était la troisième ville de l’empire en importance et la première par la dépravation et la flagrante immoralité. Gonod avait des affaires considérables à traiter, de sorte que Jésus et Ganid furent souvent laissés à eux-mêmes. Ils visitèrent tout dans cette ville polyglotte, sauf le bocage de Daphné. Gonod et Ganid se rendirent seuls à ce haut lieu d’infamie, car Jésus refusa de les y accompagner. Les scènes n’étaient pas trop choquantes pour des Hindous, mais elles étaient répugnantes pour un Hébreu idéaliste.
Jésus devenait plus grave et pensif à mesure qu’il se rapprochait de la Palestine et de la fin de leur voyage. Il s’entretint avec peu de gens à Antioche et se promena rarement dans la ville. Après beaucoup de questions sur les raisons pour lesquelles son maitre manifestait si peu d’intérêt pour Antioche, Ganid finit par amener Jésus à dire : « Cette ville n’est pas loin de la Palestine ; peut-être y reviendrai-je un jour. »
Ganid fit une expérience très intéressante à Antioche. Le jeune homme s’était montré un élève capable et avait commencé déjà à appliquer pratiquement certains enseignements de Jésus. Un certain Hindou engagé dans les affaires de son père à Antioche était devenu si désagréable et maussade que son renvoi avait été envisagé. Lorsque Ganid en eut vent, il se rendit au siège des affaires de son père et eut une longue conversation avec son compatriote. Cet homme avait le sentiment d’avoir été placé à un poste qui ne lui convenait pas. Ganid lui parla du Père qui est aux cieux et amplifia sous bien des rapports ses vues sur la religion. Mais, dans tout ce que Ganid put dire, ce fut un proverbe hébreu qui fit le plus de bien à son interlocuteur, et voici cette parole de sagesse : « Quoi que ta main trouve à faire, fais-le avec toute ta puissance. »
Après avoir préparé leurs bagages pour la caravane de chameaux, les trois compagnons continuèrent leur route en descendant jusqu’à Sidon puis, de là, à Damas, et, trois jours plus tard, ils se préparèrent à faire la longue randonnée à travers les sables du désert.