En mars de l’an 22, Jésus prit congé de Zébédée et de Capharnaüm. Il demanda une petite somme d’argent pour couvrir ses frais de voyage jusqu’à Jérusalem. Pendant qu’il travaillait chez Zébédée, il n’avait prélevé sur son crédit que les faibles montants envoyés mensuellement à sa famille de Nazareth. Un mois, Joseph venait à Capharnaüm chercher l’argent, et le mois suivant, Jude passait par Capharnaüm pour prendre l’argent de Jésus et l’emporter à Nazareth. Le centre de pêche où Jude travaillait n’était qu’à quelques kilomètres au sud de Capharnaüm.
Quand Jésus quitta la famille de Zébédée, il fut d’accord pour rester à Jérusalem jusqu’à la Pâque, et eux promirent d’être tous présents à cet évènement. Ils convinrent même de célébrer ensemble le souper de la Pâque. Ils furent tous très attristés par le départ de Jésus, spécialement les filles de Zébédée.
Avant de quitter Capharnaüm, Jésus eut une longue conversation avec son nouvel ami et compagnon intime, Jean Zébédée. Il dit à Jean qu’il envisageait de beaucoup voyager jusqu’à ce que « mon heure soit venue », et il demanda à Jean d’agir à sa place pour envoyer, chaque mois, un peu d’argent à la famille de Nazareth jusqu’à épuisement des fonds dont on lui restait redevable. Jean lui fit cette promesse : « Mon Maitre, vaque à tes affaires et fais ton travail dans ce monde. J’agirai pour toi en ceci comme en toute autre matière ; je veillerai sur ta famille comme si je devais entretenir ma propre mère et m’occuper de mes propres frères et sœurs. Je disposerai de ta créance sur mon père comme tu me l’as indiqué et selon les nécessités. Quand ton argent aura été dépensé, si je n’en reçois pas de toi et si ta mère est dans le besoin, alors je partagerai mes propres gains avec elle. Va ton chemin en paix. J’agirai à ta place en toutes ces affaires. »
Après le départ de Jésus pour Jérusalem, Jean consulta donc son père Zébédée au sujet de l’argent dû à Jésus et fut surpris que le montant en fût si élevé. Comme Jésus avait laissé l’affaire entièrement entre leurs mains, ils convinrent que le meilleur plan était d’investir ces fonds en immeubles et d’en employer le revenu à aider la famille de Nazareth. Zébédée connaissait une petite maison de Capharnaüm qui était hypothéquée et à vendre ; il recommanda à Jean de l’acheter avec l’argent de Jésus et de garder en dépôt le titre de propriété pour son ami. Jean fit ce que son père lui avait conseillé. Pendant deux ans, le revenu de la maison fut affecté à rembourser l’hypothèque. En y ajoutant une importante somme que Jésus envoya bientôt à Jean pour être employée aux besoins de la famille, ce fut presque suffisant pour couvrir le montant de l’achat. Zébédée fournit la différence, de sorte que Jean paya le restant de l’hypothèque à l’échéance, acquérant ainsi la pleine propriété de cette petite maison de deux pièces. De cette manière, Jésus devint propriétaire d’une maison à Capharnaüm, mais on ne le lui avait pas dit.
Quand la famille, à Nazareth, apprit que Jésus avait quitté Capharnaüm, et faute de connaitre l’arrangement financier pris avec Jean, elle crut que le moment était venu pour elle de se tirer d’affaire sans plus compter sur l’aide de Jésus. Jacques se rappela son accord avec Jésus et, avec l’aide de ses frères, il assuma aussitôt la pleine responsabilité des charges de la famille.
Mais revenons maintenant en arrière pour observer Jésus à Jérusalem. Pendant près de deux mois, il passa la plus grande partie de son temps à écouter les discussions au temple et à faire des visites occasionnelles aux différentes écoles de rabbins. Il passa, à Béthanie, la plupart des jours de sabbat.
Jésus avait emporté avec lui, à Jérusalem, une lettre de la femme de Zébédée pour l’ancien grand-prêtre Annas, dans laquelle Salomé le présentait exactement comme « l’un de mes propres fils ». Annas lui consacra beaucoup de temps et l’emmena personnellement visiter les nombreuses académies des éducateurs religieux de Jérusalem. Alors que Jésus inspectait à fond ces écoles et observait soigneusement leurs méthodes d’enseignement, il ne posa pas la moindre question en public. Bien qu’Annas considérât Jésus comme un grand homme, il était perplexe pour le conseiller. Il reconnaissait qu’il serait stupide de lui suggérer d’entrer comme étudiant dans l’une des écoles de Jérusalem, et cependant il savait bien que l’on n’accorderait jamais à Jésus le statut officiel d’enseignant, faute d’avoir été formé dans ces écoles.
Le moment de la Pâque approchait et, parmi la foule venant de partout, Zébédée et toute sa famille arrivèrent de Capharnaüm à Jérusalem. Ils descendirent tous dans la spacieuse maison d’Annas où ils célébrèrent la Pâque comme une famille heureuse et unie.
Avant la fin de la semaine de la Pâque, et apparemment par hasard, Jésus rencontra un riche voyageur et son fils, un jeune homme d’environ dix-sept ans. Ces voyageurs venaient des Indes et, comme ils allaient visiter Rome et divers autres points de la Méditerranée, ils avaient combiné d’arriver à Jérusalem pendant la Pâque, espérant trouver quelqu’un qu’ils pourraient engager à la fois comme interprète pour eux deux et comme précepteur pour le fils. Le père insista pour que Jésus consentît à voyager avec eux. Jésus lui parla de sa famille et lui dit qu’il était bien délicat de partir au loin pour presque deux années pendant lesquelles les siens pourraient se trouver dans le besoin. Sur ce, le voyageur venu de l’Orient proposa d’avancer à Jésus le salaire d’une année afin qu’il puisse confier ces fonds à ses amis pour préserver sa famille de la gêne, et Jésus accepta de faire le voyage.
Jésus remit cette importante somme à Jean, le fils de Zébédée. Vous savez comment Jean employa cet argent pour liquider l’hypothèque sur la propriété de Capharnaüm. Jésus mit Zébédée entièrement dans la confidence de ce voyage méditerranéen, mais lui enjoignit de n’en parler à personne, pas même à ceux de sa chair et de son sang. Zébédée ne révéla jamais qu’il connaissait les lieux de séjour de Jésus durant cette longue période de presque deux ans. Avant que Jésus ne rentrât de ce voyage, la famille de Nazareth était sur le point de le considérer comme décédé. Seules les assurances de Zébédée, qui vint à Nazareth à plusieurs occasions avec son fils Jean, laissèrent vivre l’espoir dans le cœur de Marie.
Pendant ce temps, la famille de Nazareth se tirait très bien d’affaire. Jude avait considérablement augmenté sa quotepart et maintint, jusqu’à son mariage, cette contribution supplémentaire. Nonobstant le peu d’assistance dont ils avaient besoin, Jean Zébédée continua d’apporter, chaque mois, des cadeaux à Marie et à Ruth, selon les instructions de Jésus.